Pourquoi les performances de l’économie européenne qui, dans les années 1960 à 1980, tendaient à rattraper celles des Etats-Unis, décrochent-elles depuis quinze ans ? Revue de détail.
[Le Monde - Les débats éco du samedi 16 mars 2024]
« L’Union européenne a atteint ou dépassé le niveau d’ouverture observé à l’intérieur des Etats-Unis », constate l’économiste Marta Santamaria Monturiol. Elle explique que, de façon inattendue, les échanges entre Etats membres de l’Union européenne sont plus aisés qu’entre Etats fédérés américains, sauf sur le marché du travail.
Selon l’économiste belge Reinhilde Veugelers, « la comparaison entre les systèmes d’innovation européen et américain n’est guère encourageante pour l’Europe ». Elle décrit la dégradation des positions européennes dans l’innovation technologique des secteurs du numérique et de la santé, face aux Etats-Unis mais aussi à la Chine.
« L’idée selon laquelle les performances économiques de l’Europe seraient inférieures à celles des Etats-Unis est erronée », affirme l’économiste Zsolt Darvas. Il met en garde contre les biais statistiques qui orientent le discours sur un « décrochage » européen.
« L’immigration participe à la vitalité de l’économie américaine », montre l’économiste Hillel Rapoport. Derrière l’apparence d’une même hostilité aux migrants, leur apport à l’économie américaine est bien plus important qu’il ne l’est en Europe, faute d’une politique adéquate.
« Les écarts de performance entre des pays appliquant les mêmes règles européennes sont la preuve que ce ne sont pas ces règles qui sont en cause », estime l’ancien haut fonctionnaire européen Bruno Alomar. D’après lui, le décrochage de l’Europe vis-à-vis des Etats-Unis est l’effet des politiques économiques nationales plutôt que communautaires.