« Tous pourris », « écuries à notables », les partis politiques semblent avoir bien mauvaise presse auprès des citoyens qui manifestent leur déception, voire leur colère, par l’abstention, voire le vote Front national. Leur présence dans la vie politique est pourtant de plus en plus forte dans la vie démocratique – tout candidat à un mandat politique doit prendre le parti, la fédération, la section du parti suivant son ambition.
Marquée par la loi Le Chapelier (1791) qui interdit les associations, la France n’a vu la création d’un parti politique qu’au début du vingtième siècle avec le parti radical en 1901, la SFIO en 1905, le PCF en 1920 lors d’une scission au congrès de Tours de la SFIO.
L’institutionnalisation des partis politiques est introduite dans le droit français en 1958, avec la constitution dans son article 4 et lui donne des droits (se former librement, se présenter aux élections, garantie du pluralisme politique) et des devoirs (respecter la souveraineté nationale et la démocratie).
Le PCF, fortement implanté autour de Paris, a constitué un efficace outil de formation de la citoyenneté, de militants, de responsables du parti et d’élus. La SFIO, devenue PS en 1971 au congrès d’Epinay, forme aussi ses militants.
La droite est restée plus longtemps sur le mode de fonctionnement du dix-neuvième siècle, à savoir la formation de groupes informels autour d’un chef ou d’intérêts communs. Elle peine à sortir du modèle de la troupe autour du chef, mais le choc des champions mobilise de plus en plus un fondement idéologique – l’acceptation des idées d’extrême droite à l’UMP.
Chacun est libre d’adhérer à un parti politique, chacun est libre de sa motivation pour le faire. Cette motivation peut être la camaraderie et le sentiment d’appartenance et la discussion en réunion, la proximité idéologique, le service aux autres en prenant une responsabilité (dans l’organisation du parti ou au sein d’un conseil municipal), la volonté de prendre un mandat.
Deux problèmes touchent les partis politiques français :
- La prise du pouvoir et le maintien au pouvoir deviennent la question centrale du parti qui crée une élite toujours candidate, très solidaire pour rester dans l’élite et qui fausse le débat interne.
- Le programme se réduit à des objectifs sans contenu structurel, se limite au quoi sans référence au comment qui constitue le centre différenciant vraiment les politiques.
La fiscalisation de la sécurité sociale est un exemple caractéristique. La droite veut réduire le coût du travail, la gauche de gouvernement aussi. Les entreprises ont été exonérées des cotisations patronales sur les salaires inférieurs à un certain niveau. Mais les charges de la sécurité sociale doivent toujours être alimentées par des ressources suffisantes. La droite prêche pour l’instauration d’une TVA sociale – payée majoritairement par les revenus les plus bas. La gauche instaure la CSG payée à 95% par les salariés. Finalement, pour une diminution de 100 sur les cotisations patronales, 95 sont remplacés par la CSG payée par les salariés, 5 par la CSG payée sur les revenus du capital.
La majorité des militants du PS acceptent cette réforme au prétexte que les revenus du capital participent maintenant au financement de la sécurité sociale et considèrent comme une bonne chose l’augmentation des marges des entreprises qui en résulte. Mais cette augmentation des marges peut être au bénéfice du projet industriel ou des distributions du résultat des exercices. Une exonération de 30 Md€ par an ne produit pas un surplus d’investissement en proportion. Elle passe donc majoritairement en dividendes.
En fait, avec les exonérations de cotisations patronales, la société commerciale peut distribuer plus et ses membres contribuer à la sécurité sociale en mobilisant une partie de ce gain. Les salariés doivent supporter la différence au travers de la CSG qu’ils paient – autant que l’impôt sur le revenu. Impossible d’en parler au PS, il ne faut pas déjuger le gouvernement Rocard qui a créé la CSG et les militants acceptent bien en se racontant l’histoire de la contribution des revenus du capital. Au prochain congrès du PS, les deux premières motions portent la fiscalisation de la sécurité sociale.
La politique du gouvernement socialiste est contestée au sein même du PS. Les partis de gauche non gouvernementale ne parviennent pas à se fédérer. Même quand ils parviennent à mobiliser comme le Front de Gauche jusqu’à 17% dans les sondages pré-présidentielles, les électeurs ne suivent pas et jouent l’alternance au bénéfice de Hollande. L’obsession du pouvoir touche même les sympathisants et Mélenchon n’obtient finalement que 11%. Sans cette obsession, Sarkozy serait arrivé premier, mais Mélenchon troisième et la gauche toujours majoritaire autour de Hollande, mais plus équilibrée.
Pour faire apparaître une force alternative au PS de gouvernement à gauche, il faut peut-être commencer par élaborer en commun un programme au sein d’une coquille vide appelée à remplacer toutes les structures, où travailleraient les militants des frondeurs du PS, d'EELV non gouvernemental et des autres partis de gauche.