2 févr. 2015

Que faire?

Qu’elle soit publique ou privée, la propriété totale sur l’entreprise est du vol. Elle s’attribue une richesse qui n’est pas produite par elle-même et elle dirige un bien social sans légitimité. Elle prive le pays de sa force de travail.

L’entreprise n’existe pas encore. La société commerciale qui ne vise que la réalisation des objectifs de ses membres, les associés ou les actionnaires, se présente comme l’entreprise, bien social productrice de richesse au bénéfice de tous. Le Medef, syndicat des associés et des actionnaires, se prétend mouvement des entreprises de France. Et le gouvernement fait semblant d’y croire : « J’aime l’entreprise. » proclame Manuel Valls.

La lutte des classes

Le 20ème siècle est le siècle de la lutte des classes. Prolétariat et bourgeoisie se sont opposés violemment tout au long du siècle jusqu’à diviser le monde en deux blocs qui se sont fait une guerre froide souvent très chaude de trente ans.

Propriété publique ou propriété privée des moyens de production, c’est l’alternative qu’a imposé la lutte des classes tout au long du 20ème siècle, dans son expression politique de prise du pouvoir.

La révolution de 1917 a expérimenté la propriété publique. Cette expérimentation a bien vite été instrumentalisée au bénéfice d’une oligarchie de plus en plus sénile au fil des ans.
Impliquée dans le régime nazi, collaboratrice du régime de Vichy, la bourgeoisie n’a pas pu empêcher la réalisation du programme du conseil national de la résistance, ni refuser les nationalisations, la mise en place de la sécurité sociale. Elle s’est vue imposer le respect du compromis social de sécurité d’emploi en échange de la subordination qu’elle a gardé sur le travail.
Au niveau international, le capitalisme a accepté l’Etat providence. Il a laissé le totalitarisme au bloc communiste jusque dans les années 1970 avec l’expérience de la dictature au Chili, servi par une dictature violente conseillée par les universitaires ultralibéraux américains.

La septième décennie du 20ème siècle est celle du retournement. Le bloc communiste s’enfonce dans un autoritarisme qui le fait s’écrouler en une vingtaine d’année. Le bloc capitaliste se débarrasse de ses aménagements keynésiens, les salariés perdent leur sécurité d’emploi et la subordination au capital se fait de plus en plus lourde.

A la chute du mur de Berlin, avec la disparition du bloc communiste, le capitalisme semble avoir gagné : c’est la fin de l’histoire.

L’émancipation de l’entreprise

Entre la propriété privée des moyens de production sans sécurité d’emploi salarié et la propriété publique des moyens de production sans contrepouvoir citoyen,  il doit bien être possible de trouver un chemin vers le bien vire ensemble.

Actuellement, la société commerciale pilote salariés, fournisseurs et clients pour qu’ils produisent au maximum (respectivement produits et services, travail et factures) au coût le plus bas (respectivement factures, salaires et produits ou services). Le Medef, le lobby des sociétés commerciales, pleure des baisses de « charges », moins d’impôt sur les sociétés, plus d’aides, etc. Et le gouvernement le satisfait.

Dans les années 1980, les salaires ont perdu 10% dans le PIB. Après avoir réussi à obtenir le paiement des cotisations patronales par les salariés mieux payés, mais pas suffisamment pour défiscaliser, le Medef essaie de reprendre 10% sur les salaires avec la disparition de l’ARCCO-AGIRC.

Faisons de l’entreprise une réalité, ramenons l’appétit et le pouvoir de la société commerciale au poids réel de sa contribution, au poids du capital propre délesté des réserves produites par le travail passé. Le collectif de travail (entrepreneur et salariés) doit enfin retrouver le poids qu’avait l’entrepreneur dans les trente glorieuses.

La mise en réserve des bénéfices assurerait mieux l’avenir de l’entreprise et le niveau de l’emploi que les hypothétiques investissements visés par les aides, exonérations et autres baisses des coûts.

D’autre part, l’éventuelle vente du capital ne perturberait pas tant la conduite de l’entreprise, la pérennité du projet, l’acheteur n’obtenant pas plus de pouvoir dans l’entreprise que le vendeur.

Bien que le taux de croissance soit plus bas que celui qui avait cours durant les trente glorieuses, il porte sur une somme beaucoup plus grande aujourd’hui, ce qui produit un surplus bien plus fort pour une population qui n’augmente pas tant que cela.

En ne détournant pas la richesse produite dans des intérêts privés, en répartissant mieux la quantité d’un travail mieux sollicité sur des projets utiles, il serait possible de rémunérer justement les qualifications et de motiver ainsi les salariés à se former tout au long de la vie.

Chacun ayant quelque chose à perdre, la société civile serait plus en sécurité.