24 mars 2015

Après les salaires, les retraites...

Le dernier quart du 20ème siècle a vu la part du travail réduite de 10 points dans le PIB à cause de la modération et de l’individualisation des salaires, du chômage, de la précarisation des emplois et des exonérations de cotisations sociales. Avec les réformes des retraites, la disparition de l’ARCCO-AGIRC et le développement de la capitalisation, ce sont encore 10 points de moins du PIB qui sont visés pour le travail.

Les salaires

Le salaire
Le salaire est constitué de deux parties : le salaire net et les cotisations. A la création de la sécurité sociale, les cotisations ont été divisées en cotisations salariales (dites payées par le salarié) et en cotisations patronales (dites payées par l’employeur).

En fait ces cotisations sont toutes deux versées directement par l’employeur à la sécurité sociale. Mais cela permet au Medef de parler de charges sociales pour demander l’exonération des cotisations patronales.

Les exonérations de cotisation patronale portent actuellement sur les salaires versés à la moitié des salariés – les salaires inférieurs à la médiane des salaires.

Les exonérations (33Md€ par an) constituent un défaut de ressources pour la sécurité sociale en grande partie comblé par l’État grâce à la CSG, pour plus de 95% payée par les salariés : ceux qui gagnent suffisamment pour payer des impôts, mais pas assez pour pouvoir défiscaliser. Des salaires nets paient des cotisations patronales !

Si la sécurité sociale est en difficulté, c’est que les cotisations sont réparties sur trop peu de salariés à cause du chômage et que la moitié des salariés (les femmes) sont discriminés dans leur salaire. Réduire les cotisations ne fait que propager la précarisation à tout le monde, en matière de santé et de dépendance, ainsi qu’en matière de ressources en situation de chômage ou de retraite. C’est bien l’activité économique qui est la solution et les quarante années passées montrent que la baisse des salaires ne garantit pas l’augmentation des investissements.

Les négociations ARRCO-AGIRC (http://www.ugict.cgt.fr/agirc)

Le 17 février dernier se sont ouvertes les négociations sur les retraites complémentaires avec deux propositions : celle de la CGT et celle du Medef.

Pourquoi une retraite complémentaire ?

L’Agirc a été créée dès la mise en place de la sécurité sociale pour permettre aux cadres d’accepter de rentrer dans le système. La retraite complémentaire, l’Arrco comme l’Agirc, permet de compléter la pension sur les salaires supérieurs au plafond de la sécurité sociale : 38 040 € brut pour l’année.

Actuellement, grâce aux retraites complémentaires, le taux de remplacement pour un cadre rémunéré au salaire moyen est de 68%, 72% pour un non-cadre.

Répartition ou capitalisation ?

Deux systèmes de retraite coexistent dans le monde :
  • la répartition assure le paiement des pensions à partir des cotisations des salariés employés au même moment, à un niveau de pouvoir d’achat semblable à celle des salariés  et constitue les droits à retraite de chaque salarié qui cotise ;
  • la capitalisation impose à chacun une phase d’épargne qui définit à l’avance le niveau de la pension individuelle en fonction de l’espérance de vie  au moment du départ en retraite.
Répartition, la retraite en toute sécurité - Bien sûr, une retraite par répartition assure un niveau de vie qui évolue avec l’environnement économique (salaires, pouvoir d’achat) en même temps que celui des actifs contemporains.

Capitalisation, le risque pour l’épargnant, la sécurité pour le banquier - Le niveau de vie de la pension par capitalisation est défini selon l’épargne et l’espérance de vie et est payée si l’organisme gérant ne fait pas faillite.

Propositions CGT

L’Agirc épuise ses réserves en 2018, l’Arrco en 2027.
Comme toutes les branches de la sécurité sociale, les retraites sont en difficulté financière à cause du volume du chômage et de l’insuffisance de l’activité économique. Mais des solutions existent sans en appeler aux grandes manœuvres  :
  • l’égalité salariale entre les femmes et les hommes permettrait de réduire de moitié le déficit de l’Agirc et de reconstituer des réserves annuelles de 13 mois de paiement à l’Arrco ;
  • l’alignement des taux de cotisation au-dessus du plafond de la sécurité sociale sur ceux d’en-dessous – il en coûterait un peu plus de 7 € par mois pour un salaire de 4 000 € et cela permettrait de rétablir l’équilibre financier de l’Agirc jusqu’en 2033 ;
  • l’augmentation de la garantie minimale de points  (150 points) et de la cotisation correspondante réduit le déficit prévu en 2040 de près de 10% ;
  • la mise en place d’une cotisation patronale de 10% sur l’intéressement, la participation et l’abondement aux plans épargne entreprise effacerait près du quart du déficit de l’Agirc et des trois-quarts de celui de l’Arrco .
Le partage des efforts

Pour financer les régimes de retraite, le Medef souhaite ramener les cotisations dites patronales de 60% à 33% – nous avons vu qu’elles font partie de la masse salariale et constituent donc une partie du salaire.

Depuis la fin des années 1980, le Medef veut imposer l’idée que l’effort de financement des régimes de retraite devrait être partagé entre actifs, entreprises et retraités. C’est ainsi qu’il souhaite parvenir à ses fins et ne financer qu’un tiers des cotisations, les salariés en payant les deux tiers, un tiers en tant qu’actif et un tiers en tant que retraité.

Raccorder réforme et progrès social

Depuis 1993, les réformes des retraites se sont multipliées, mobilisant énormément d’opposants contre elles. Depuis 2014 et la création du comité de suivi des retraites, les réformes ne seront plus nécessaires et de simples actes administratifs suffiront à satisfaire les recommandations des experts qui en sont membres : plus de grand mouvement d’opposition ! Une des missions du comité de suivi est d’assurer l’équité : cela signifie que tous les régimes sont liés à l’évolution décidée en son sein.

Les salariés ont tout intérêt à rester vigilant sur l’évolution du système de retraite et déjouer les manœuvres du Medef pour favoriser l’activité des assureurs par la diffusion de la capitalisation.