16 nov. 2025

Le peuple français

La République Française veut être une démocratie, son peuple détient le pouvoir. Or la majorité du peuple français est exclu de tout pouvoir. Alors qu'ils représentent 20% de la population française, les ouvriers sont bien peu nombreux à l'Assemblée nationale. Comment se fait-il que les ouvriers se sentent si peu représentés alors que les députés sont nombreux à parler au nom du peuple ? Ces représentants tombent bien souvent dans deux travers : la droite confond "Peuple" et "Nation" pendant que la gauche confond "peuple" et "classes populaires".

Alternatives économique a rencontré Gérard Noirel à la suite de la parution de son livre "Le Peuple français" paru le 4 septembre 2025 chez Taillandier. Dans son entretien, l'auteur définit  le peuple français comme la population qui paie l'impôt à l'Etat français. C'est ainsi que  son "Histoire populaire de la France", commence "en 1439, quand Charles VII met en place la taille, l’impôt royal, régalien, qui permet de payer les soldats, de développer l’Etat, et qui va générer les luttes sociales – car les grandes luttes populaires, jusqu’en 1789, ce sont des luttes à partir de la question de l’impôt".

"Le peuple est donc l’ensemble des individus soumis aux lois d’un même Etat, y compris avec les privilèges sous l’Ancien Régime." 

La République française est le produit de la Révolution française survenue "au nom de l’abolition des privilèges et de l’égalité devant l’impôt – une question qui, on le voit en ce moment, est toujours d’actualité !"

Individus dépendant d’un même Etat, le peuple n'est pas déterminé par le droit du sang ou par l'occupation d'un lieu géographique en opposition aux étrangers - il dépasse la notion de Nation - et ne peut se limiter aux classes populaires en opposition à l'oligarchie. Qu'ils aient ou non des papiers, les migrants qui envoient leurs enfants à l'école appartiennent au peuple français.

La  vie et l’histoire d’un peuple est faite de solidarité et de domination. 

Le succès contemporain du populisme vient de ce qu'il prend place dans dans les contingences de l'actualité contre les élites, mais dans l'intérêt final des classes dominantes, on le voit dans les prises de position du RN à l'Assemblée nationale et dans ses amabilités en direction du Medef.

"Je récuse [...] l’emploi du mot populiste lorsqu’il consiste à caractériser tout parti qui défend les classes populaires. C’est une manière de discréditer des prises de paroles légitimes. C’est pour cela que je ne place pas Jean-Luc Mélenchon parmi les populistes." La France Insoumise construit sur un peuple opposé à l'oligarchie comme le RN contre les élites, mais se place dans la vision optimiste du progrès. la taxer de populiste ou d'extrêmiste de gauche ne vise qu'à affaiblir le mouvement d'émancipation de la domination de plus en plus explicite de cette ultra-riche minorité qui manifeste aujourd'hui sa volonté d'instaurer un pouvoir ploutocratique sur toute la société.

Depuis que la révolution française a décrété le peuple souverain, aucun pouvoir ne peut être fondée sur une aristocratie dominante et un peuple soumis. Mais comme au temps de la monarchie de juillet, les mauvais pauvres issus des banlieues font peur quand le bon peuple de la France qui se lève tôt et forme la base des partis de l'ordre.

Plus que des désordres socio-économiques dont souffre une France en perte de pretige dans le monde, le populisme se nourit des jugements promus par des médias soumis aux puissance de l'argent que les inertventions bouculées des intellectuels confortent à défaut de temps pour présenter les résultats de recherches compliquées à comprendre. "L’offensive réactionnaire contre « l’islamo-gauchisme », cautionnée au plus haut niveau de l’Etat par l’ancien ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, a fait long feu. Mais elle ressurgit régulièrement sous des formes diverses, relayée par les médias de l’empire Bolloré."

Pour défendre l'autonomie de la science, le collectif DAJA, une association d’éducation populaire qui intervient dans les lycées, les collèges et les centres sociaux, permet de s'adresser à des gens qui ne lisent pas. Ce travail collectif avec des enseignants du primaire, du secondaire, des travailleurs sociaux, des artistes est une forme d’engagement modeste plus utile à quelque chose que d’alimenter les polémiques stériles.