La sécurité économique consiste à mutualiser une part de la valeur ajoutée des entreprises pour assurer le versement de salaires permettant à chaque travailleur de vivre décemment. Il s'agit de la généralisation du mécanisme déjà existant mis en place par le Medef et rendu obligatoire par l'Etat (AGS) pour assurer les salaires des entreprises en difficulté à toutes les entreprises pour tous les revenus, quel que soit le statut (salariés, indépendants).
Le principe de base de la Sécurité économique est de verser une allocation à toute entreprise - indépendants compris - pour chaque emploi en équivalent temps plein. Cette allocation n'est pas financée par l'Etat - pas d'impôt supplémentaire - mais par l'ensemble des entreprises au travers d'une caisse inter-entreprises de Sécurité économique.
La filiation de la Sécurité économique avec la Sécurité sociale semble évidente. Cette dernière fêtera ses 80 ans en 2025 et son histoire n'est pas cette évolution intelligente et consensuelle présentée par l'institution, mais une longue bataille émaillée de nombreux conflits, notamment sur l'étatisation du système. Son histoire peut donner un certain nombre d'indications sur les risques qui pèsent sur ce type de systèmes.
Les risques
L'indépendance: l'Etat supporte mal que les prélèvements obligatoires lui échappent. A la suite des réformes apportées au financement de la Sécurité sociale, l'Etat finance plus d'un quart de la protection sociale. Le risque de voir la Sécurité économique alimentée par l'impôt est grand; le mécanisme est connu: les exonérations de charges au service de la politique industrielle.
Les besoins: l'Etat a une obsession budgétaire qui le pousse à limiter la dépense, il est incapable d'assurer à chacun selon ses besoins et ne cesse de limiter le service qu'il rend. Le risque est grand de voir les cotisations ne pas répondre aux besoins du modèle de société qui les justifie.
La valeur ajoutée
En moyenne, depuis le milieu des années 1980, chaque entreprise verse 2/3 de sa valeur ajoutée en salaires et en garde 1/3 en profits pour conforter et développer son outil de production. C'est ce qu'a montré le rapport Cotis en 2009 (Partage de la valeur ajoutée, partage des profits et écarts de rémunérations en France), rapport qu'il serait important de mettre à jour.
A la suite de la remise de ce rapport, l'INSEE a publié les résultats d'une approche microéconomique de la question du partage de la richesse qui montre qu'un quart des entreprises distribuent 73% de leur valeur ajoutée en salaires et un quart 44%, 31% en moyenne dans le secteur des services immobiliers et 81% en moyenne dans le secteur de la construction. La taille de l'entreprise est aussi un paramètre influant sur ce partage, les PME et les ETI distribuant plus de salaires en moyenne (66-67%) que les grandes entreprises (59%).
Une cotisation de 2/3 sur chaque valeur ajoutée permettrait de libérer les entreprises du versement des salaires, leur assurerait un profit d'un tiers de leur valeur ajoutée pour réparer les actifs, rembourser les dettes, conforter les fonds propres et gratifier les actionnaires (dividendes distribués selon le portefeuille de chacun)) et les salariés (primes distribuées selon les choix managériaux).
Le modèle de société
La sécurité économique, comme la sécurité sociale, oppose un modèle de société plus respectueux envers les personnes et plus efficace pour les organisations. En complétant cette sécurité économique d'une réforme de la gouvernance des entreprises qui reconnaisse la contribution du collectif de travail aux ressources de l'entreprise, il serait possible de répondre non seulement aux enjeux sociaux, mais aussi aux enjeux environnementaux - de façon évidente, la simple recherche de production financière est incapable de mettre en place un système de production vertueux.
Le conseil d'administration est un organe de la société d'actionnaires dans lequel les salariés ne seront que des invités. La démocratisation de l'entreprise ne peut que se faire au sein d'un conseil d'entreprise réunissant les représentants de la société d'actionnaires et ceux du collectif de travail en proportion du poids de chacune de ces parties constituantes dans la formation des ressources.
Le versement des salaires étant éloigné de l'entreprise, la distribution ne peut se faire que par la reconnaissance des qualités intrinsèques de la personne (qualification et expérience)., la reconnaissance du "mérite" étant faite au niveau de la distribution des gratifications selon le bénéfice dégagé au cours de chaque exercice. Le revenu susceptible de produire de la richesse (au sens des riches) ne peut pas être gravé dans un salaire et dans la pension qui en découle à la retraite et doit rester soumise à un bénéfice réalisé.