27 nov. 2014

La défaite de la CGT aux IRP Orange 2014

La cuvée 2014 des élections IRP Orange est très mauvaise pour la fédération des activités postales et de télécommunications CGT. Elle ne permet même pas de dire que l’organisation reste première comme les années précédentes.

Personne ne doit être désigné comme responsable de la défaite électorale. Gardons à l’esprit le fait que notre but n’est pas de gagner des élections, mais de gagner les salariés à nos idées, idées alimentées par la connaissance du monde tel qu’il est aujourd’hui.

Les résultats aux IRP Orange 2014 font de la CGT un syndicat comme les autres.
Le monde n’est plus celui que beaucoup d’entre nous regrettons parce que c’était celui de notre jeunesse et que nous en avons embelli le souvenir. Le compromis social sur lequel s’était construit la société nous garantissait la sécurité d’emploi contre l’acceptation de la subordination. Les propriétaires de l’entreprise pouvaient décider de tout, ils devaient simplement nous garantir la sécurité d’emploi.

Les salariés pouvaient participer aux actions syndicales sans crainte pour leur emploi et acceptaient bien le discours de l’organisation syndicale selon lequel il fallait revendiquer plus de salaire compte tenu de la valeur ajoutée que le travail produisait.

D’autre part, la structure du collectif de travail permettait à la CGT de trouver un écho plus important grâce au poids de la catégorie employés. Aujourd’hui, la structure du collectif de travail a changé et les cadres sont majoritaires chez Orange.

La structure du collectif de travail a un impact sur le poids de la CGT.
La CGT passe en deuxième position globalement, en cinquième position chez les cadres avec seulement 20 électeurs de plus que FO, la plus petite organisation dans la catégorie.

Nous devons réinterroger notre organisation et notre pratique syndicale, mais aussi notre conception des relations que nous devons avoir avec tous les acteurs de l’entreprise : les salariés, les autres syndicats, les collègues des directions, le comité exécutif, le PDG et les actionnaires.

L’encadrement est la catégorie qui augmente le plus. Nous avons besoin d’organiser notre travail auprès des cadres au niveau de l’Établissement principal, la direction Orange Ouest. Le salarié d’un département ne fait pas partie d’un cheptel réservé au syndicat de ce département. Notre collectif DOO (élus et mandatés) doit pouvoir organiser et mettre en œuvre des actions dans toute la DOO. Les salariés des départements qui ne fonctionnent pas ne doivent pas pâtir de cette faiblesse. L’organisation fédérale doit être interrogée, vivement le congrès.

Le travail que nous avons à accomplir de se réduit pas à une posture qui se satisferait d’un simple renouvellement de notre communication. Il doit porter sur notre conception même de l’entreprise.
Le compromis social qui consistait à échanger la sécurité d’emploi contre l’acceptation de la subordination aux prérogatives patronales n’a plus cours. Aujourd’hui, un salarié sur cinq ne dispose que d’un emploi précaire, quatre sur cinq n’est recruté que sur un emploi précaire. Et les salariés n’ont le choix qu’entre deux syndicalismes :
  • la CFDT accepte cette insécurité sans remettre en cause la subordination ou si peu quand elle signe l’ANI pour des promesses de négociation sur la conduite des entreprises, négociation sur la démocratie sociale toujours sabotées par les exigences patronales ;
  • la CGT prend le parti de toujours revendiquer la sécurité alors qu’elle apparaît de plus en plus irréaliste à de plus en plus de salariés et contradictoire avec leur situation et celle de leurs proches.
La subordination devient inacceptable aujourd’hui. La revendication de la démocratie sociale ne permet pas de la remettre en cause. Elle ne prend pas appui sur une légitimité suffisamment forte par rapport à celle sur laquelle s’appuient les associés ou les actionnaires : la propriété. C’est donc la propriété de la société (association de défense des associés ou des actionnaires) sur l’entreprise qu’il faut remettre en cause.

Les directions présentent les comptes de l’entreprise aux équipes. Mais elles se limitent au compte d’exploitation, le compte qui met en exergue le coût du travail.

Le coût des partie-prenantes évoluent sous la contrainte de la baisse du chiffre d'affaires.
Quand le chiffre d’affaire baisse, le poids du travail dans le compte d’exploitation augmente naturellement. Cette lapalissade est instrumentalisée pour démontrer une dérive du coût du travail.

Cette démonstration est l’élément central du rapport de force qui affaiblit le travail. Les salariés doivent en accepter les conséquences : insécurité de l’emploi, modération des salaires, économie sur les moyens de travailler, coaching serré pour augmenter la productivité, mutualisations en tout domaine, généralisation de la multi compétence, sous-traitance même sur le cœur de métier sans regard sur toute la chaîne sous-traitante, etc.

Portons le débat sur le bilan. Formé de deux colonnes, il décrit dans la première où se trouve la richesse de l’entreprise et dans la deuxième d’où vient cette richesse.

C'est l'origine de la richesse de l'entreprise qui doit en déterminer la propriété.
Chez Orange, le capital social, propriété de la société des actionnaires, ne représente que 12% du bilan. Le reste vient du travail passé et du travail futur qui doit rembourser les dettes.

Sur cette base, la revendication de démocratie sociale paraît bien fade à côté de l’exigence de de prise en main par le collectif de travail de la part de la richesse de l’entreprise qui lui revient. L’impact de cette appropriation porte sur l’attribution du résultat et la composition du conseil d’administration. La clef de répartition doit être définie par le poids du capital social dans le bilan.

L’entreprise n’est pas la société. Pourtant Elle n’a pas d’existence juridique propre. L’organisation des cadres de la CGT, l’UGICT (Union Générale des Ingénieurs, Cadres et Technicien) a décidé de travailler à une proposition de loi qui donne à l’entreprise un statut juridique séparé de la société.

Le président de la société n’y pourrait bien sûr pas cumuler les fonctions de directeur général : le président représenterait la société des associés ou des actionnaires, le directeur général représenterait l’entreprise et serait chargé de composer les facteurs de production (capital et travail) au service du projet d’entreprise. Les représentants du collectif de travail seraient élus par le personnel.

La CGT doit s’emparer de ce nouveau compromis social qui signe la fin de la subordination et qui assure la sécurité des salariés avec le nouveau statut du travail salarié. Quant à la volonté nationale, elle peut exiger la nationalisation d’une entreprise ou d’un secteur pour être portée.